jeudi 24 mai 2018

Divination par le ciel

L'observation du ciel allait de pair avec la capacité de prédire l'avenir. Car si le monde est régi par des principes invisibles, les mouvements célestes en sont le reflet et apprendre le langage du ciel revient à connaître l'avenir.
Le ciel était considéré comme une véritable image de l’Empire et des régions voisines, image qu’il fallait interpréter dans l’intérêt du pouvoir impérial.
L'empereur est le fils du ciel (Tian Zi) dont l'autorité d'origine divine dérive de la charge (Ming) donné par le seigneur d'en haut (Shang Di) qui gouverne les âmes des morts et châtie les rois et les seigneurs dont la vertu est déficiente. En tant que tel, il doit pouvoir prédire les phénomènes cycliques qui se produisent dans les cieux. La justesse d'un Roi ou d'un Empereur se mesure par le respect de son mandat céleste (Tian Ming), qui lui-même se mesure par la capacité à établir un calendrier juste,
Si le Roi agit bien, le Ciel lui enverra les 5 bonheurs (Wu Fu). S'il agit mal, il recevra les 6 calamités (Liu Ji). Si le Roi ne respecte pas les 5 vertus, il peut influer sur l'écoulement des saisons et inversement.  
Présages célestes
Pour les anciens Chinois, les présages du Ciel s'observaient dans deux cas : les cycles célestes prévisibles et les cycles célestes imprévisibles
• Les cycles célestes prévisibles : ces changements célestes adviennent à intervalles réguliers et sont prévisibles avec exactitude. Ils incluent les cycles du Soleil, de la Lune, des Planètes et des Etoiles. Ces changements observables régulent l'ordre des événements sur Terre. . Les cycles célestes imprévisibles : ces changements célestes apparaissent soudainement. Les anciens Chinois pensaient que ces irrégularités étaient des avertissements du Ciel. L'apparence de chaque phénomène céleste annonçait les événements (souvent des catastrophes), observés comme des récompenses ou des rétributions de l'activité de l'Homme sur Terre. Comme toutes les actions terrestres s'incarnaient dans la personne de l'Empereur, tous les présages célestes révélaient si la Loi impériale était en accord ou non avec la volonté des Cieux.  
Lorsque des évènements imprévus se produisirent en Chine, on les interprétait généralement comme un mauvais présage. La seule façon de ne pas subir les phénomènes célestes consistait à être capable de les prédire et ainsi de démontrer qu'ils étaient sous contrôle.
Comme les anciens Chinois croyaient que le Ciel dévoilait ses intentions à l'humanité par la manifestation de phénomènes célestes, l'observation des tendances célestes était une activité de la plus haute importance. Afin d'éviter que de tels évènements se produisent, la divination par le ciel était une astrologie d’état opérée par un bureau d'astronomie avec une équipe de 28 astronomes de la cours qui rendait compte directement à l’Empereur et l’observation du ciel fut donc interdite au peuple, pratiquement dès l'origine de l'astrologie des 111 étoiles codifiée par l'Empereur Mythique Huang Di, en 2637 avant notre ère, de crainte que les adversaires ne l'utilisent pour déterminer les périodes de faiblesse des empereurs et tente de les renverser. Ainsi le pouvoir des premiers souverains reposait-il en grande partie sur la qualité de ses devins, qui étaient aussi les premiers astronomes. D'où la place fondamentale des astronomes officiels.

Cette équipe était chargée de rédiger les Archives historiques du Bureau astronomique impérial. Ces astronomes analysaient l'apparence des comètes et des météores, les changements de couleurs du Soleil, de la Lune et des Planètes. Pendant la journée, les astronomes impériaux regardaient les éclipses, les halos de lumière, les arcs-en-ciel et les auras célestes. Tous les présages célestes étaient observés, compilés, interprétés et rapportés à l'Empereur.
 
Le Zhou Li  (le rituel des Zhou) fournit une description idéalisée de cette institution étatique qui, à travers maintes réformes, se maintiendra jusqu'au XXème siècle. Ce bureau d'Astronomie comprenait plusieurs services  instruments, observations, calcul, calendrier, divination, enseignement.
Des tables prédisaient  les mouvements apparents du Soleil, de la Lune et des Cinq planètes, les dates des éclipses, les jours fastes appropriés au déroulement des cérémonies, à la mise en chantier des travaux, etc.
Des pronostics astrologiques étaient induits par les correspondances entre régions terrestres et secteur du Ciel traversé par ces astres (Fen Ye).


Ainsi le Roi ne peut manquer de faire un tour de son empire tous les 5 ans (pendant les 4 années suivantes, il pouvait rester chez lui, au centre). Il se déplace dans son Palais de l'Est à l'équinoxe de Printemps, au Sud au Solstice d'Eté, à l'Ouest à l'équinoxe d'Automne, au Nord au Solstice d'Hiver. A chaque étape, il assemblait un quadrant de l'empire et tenait une cour de couleur adaptée : verte, rouge, blanche ou noire, pour l'Est, le Sud, l'Ouest ou le Nord. Ce ne sont pas seulement les quartiers de la Chine qui étaient concernés, mais ceux de l'Univers dans son ensemble. Inversement, ce qui se passait dans un cadran donné du Ciel, reflétait un état de la qualité associée ou de la région associée à cette Direction. Si une comète se produisait dans une direction donnée, cela indiquait un mauvais présage pour le royaume correspondant. Si une éclipse de soleil se produit, c'est à dire si la Lune se place devant le Soleil, le Yin empiète sur le Yang, c'est qu'un vassal, un prince, a infligé un outrage au souverain.
Lorsqu'une éclipse approchait et qu'elle avait été prédite par les calculs des astronomes astrologues, l'astrologue de l'Empereur était chargé d'annoncer le phénomène et aussitôt la cour impériale devait jeûner. Puis, au moment précis de l'éclipse, des archers tiraient des flèches vers le Soleil pour abattre le monstre qui est en train de le dévorer, tandis que l'Empereur lui-même tapait sur un tambour. La garde impériale quant à elle, se tenait en arme, près de la Tour de la Rosée afin d'être prête à délivrer le Soleil.   
Pour les anciens chinois, la voûte céleste et ses constellations tourne sur elle-même, comme un bol qui serait posé sur un axe invisible, l'axe du monde ou axis mundi, dont la base sur terre serait selon la légende située sur le Mont KUNLUN et la pointe céleste serait l'étoile polaire, la seule étoile qui ne semble pas bouger sur la voûte céleste, comme si toutes les étoiles tournaient autour de celle-ci. Il existerait une unité invisible, dont la manifestation invisible serait le faîte suprême, le Tai Yi ou l'unité suprême, le Tai Yi, l'étoile polaire. Ainsi, les mouvements célestes indiquent un centre dont tous les mouvements semblent émaner. Celui qui est en harmonie avec le Ciel et la Terre saura réaliser en lui même le centre dont partent tous les mouvements.
Le monde des hommes est un monde sans cesse changeant, celui du ciel est éternel et immuable; Les changements des hommes sont réguliers et rythmés à l'image de la circulation du souffle qui les anime. Oublier le ciel, cela signifie vivre dans le monde des changements en disharmonie avec les rythmes issus du Dao sur lequel sont modelés les mouvements célestes.
Le ciel est le royaume du non-manifesté, de l'aspect à priori de l'univers. Il est aussi par conséquent ce qui modèle la création. Par cette action, le ciel représente le Yang absolu et immuable, car il est uniquement actif et non pas passif. C'est le monde de l'énergie dans sa dimension cosmique. Celui qui , agit sur nous mais sur lequel on ne peut pas agir.
Que ce soit les saisons, les marées ou ne serait-ce que ce que nous nommons jour ou nuit, tous ces phénomènes ne sont que la manifestation des ces principes célestes immuables.

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