lundi 15 octobre 2018

Fixer son attention et intention sur les effets des exercices dans la pratique du Qi Gong

Le thème de l'attention se fixe sur le pouvoir symbolique de l'exercice que son inventeur lui a conféré et que la tradition a transmis jusqu'à nos jours. Il en est ainsi de l'exemple du "jeu des cinq animaux " de Hua Tuo. Dans cette famille d'exercices, il est dit que les mouvements doivent être exécutés à partir du champ de cinabre supérieur, au niveau de la tête. La pensée et surtout l'intuition du contenu mimétique que véhicule chacun des cinq animaux, joueront un rôle déterminant, non seulement sur la qualité d'exécution des mouvements, mais surtout sur l'effet que le pratiquant pourra en ressentir dans sa physiologie du Qi.
Le classique de Hua Tuo cité par Hu Yao Zheng énonce :
"Quand on est parvenu à un certain niveau de Qi Gong, on peut saisir comment il effectue sa révolution et recommence, comme s'il se mouvait en cercle fermé ".

Les quatre rituels sacrés

Le principe fondamental du Qi Gong traditionnel est de suivre le chemin de la nature.  En conséquence, les quatre postures, Zhan Zuo Xing Wo , également connues sous le nom de Si Wei Yi 威儀 Quatre Rituels Sacrés dans la tradition chamanique chinoise, s'inspirent de la nature : se tenir droit comme un pin, s’asseoir comme une cloche, marcher comme le vent, se coucher comme un archer.

Pratique du Dao Yin Postural statique

La pratique du Qi Gong postural statique intègre les trois disciplines Dao Yin (posture, souffle et mental) pour chaque position. Cela demande de maintenir le corps physique dans un état d'immobilité, tout en continuant de respirer calmement, et en gardant le mental tranquille et serein. En tenant des postures fixes (par exemple : des postures allongées, assises ou debout), les pratiquants de Qi Gong s'entraînent à accumuler le Qi substantiel dans leur Dan Tian inférieur, ou à le faire circuler dans leur corps. 
 

Fixer son attention sur la circulation du Qi dans la pratique du Qi Gong

Cette attention utilise au début l'imagination pour se rendre conscient de phénomènes qui sont habituellement hors de notre portée de perception: c'est ce que l'on appelle aujourd'hui la visualisation.
ü  Ou bien on visualise ses organes internes comme le foie, les reins, le cœur, etc.,
ü  ou bien, le plus souvent, on visualise les méridiens: le système des 12 méridiens principaux, le système des 8 méridiens particuliers,
ü  et plus classiquement, la petite circulation céleste des deux méridiens antéropostérieurs Vaisseau Conception et Vaisseau Gouverneur. 
Tout en visualisant ces canaux, on imagine que le Qi se déplace, en cherchant à percevoir ce déplacement interne comme une sensation chaude de coulée, de fluide ou de courant électrique léger.Les anciens accordaient une grande importance au pouvoir de la pensée pour induire cette sensation.
La conscience de l'énergie qui circule est en quelque sorte forcée au début par la concentration et l'imagination jusqu'au jour où ce phénomène devient conscient, de lui-même, et finit par se distinguer de l'imaginaire. On sent alors réellement, et de plus en plus distinctement, cette énergie circuler. Le travail sur l'énergie dans les méridiens ouvre des perspectives d'un niveau spirituel. Le fameux médecin Li Shi Zhen disait:
"Quand l'esprit est concentré sur les méridiens internes, l'adepte est capable d'observer son vrai soi ".
Extrait de "Qi Gong - Yves Réquéna- Ed. Trédaniel"

Les trois réunions dans la pratique du Qi Gong

• La Réunion cœur-esprit
Pour qu'une concentration apparaisse Il faut calmer le cœur — demeure de l'esprit. Cette concentration particulière est faite à la fois d'absence de pensée et de disponibilité attentive aux sensations. Il n'est pas d'exercice de Qi Gong qui ne commence par une détente, par la mise au calme de l'esprit et du cœur.

      La Réunion esprit-énergie
C'est elle qui vient ensuite lorsque la phase précédente est réalisée : l'esprit étant calme, la concentration permet de ressentir l'énergie qui circule dans le corps.

      La Réunion énergie-puissance
L'énergie est une force intérieure non manifestée tandis que la puissance est l'effet manifesté de l'énergie : quand l'énergie se libère, elle pousse vers l'extérieur une force dont les effets tangibles et apparents sont la puissance.
Conjointement à ces Trois réunions internes qui mettent en relation le Cœur et l'Esprit, l'Esprit et l'Énergie, l'Énergie et la Puissance, il existe les Trois réunions externes : ce sont celles des mains et des pieds, des coudes et des genoux, des épaules et des hanches.

Pratique du Dao Yin Postural dans la Chine Antique

Au cours des siècles, un large éventail d'exercices thérapeutiques s'est développé en Chine, provenant principalement d'écoles bouddhistes et taoïstes.

Sous la dynastie Han (206 avant notre ère - 220 de notre ère), le grand physicien et alchimiste taoïste, Hua Tuo, créa ainsi une série d'exercices physiques de Dao Yin dynamique, connue sous le nom de Wu Qin Xi (Le Jeu des Cinq Animaux).

Fixer son attention sur un objet ou un thème lors d'une posture de qi gong

Il peut s'agir d'un thème général sensoriel couleur, son, forme, parfum ou saveur que la pensée évoque et dont elle reçoit des impulsions subtiles. Dans le Qi Gong thérapeutique, le choix du sujet dépend des troubles fonctionnels du pratiquant.
Ainsi, selon Guo Lin dans son ouvrage Xin Qi Gong Liao Fa ou "traitement par le nouveau Qi Gong", les sujets hypertendus doivent choisir des objets situés près du sol (herbe, fleur, petit animal) ; les sujets hypotendus ou asthéniques doivent prendre des thèmes élevés (branches d'arbre, collines); les sujets équilibrés peuvent choisir des objets situés à la hauteur du VC17 Shan Zhong (entre les seins). On évite les thèmes mélancoliques dans les troubles du foie et ceux des poumons, ainsi que les couleurs violentes ou composites ; on doit éviter le rouge foncé dans les troubles cardio-vasculaires. En principe les thèmes sont choisis dans la nature, les couleurs sont douces, claires ou atténuées.
Le thème doit être choisi avec les précautions générales suivantes : il doit concerner un objet ou un spectacle proche spatialement, de façon à ne pas trop solliciter l'imagination, donc l'afflux de pensées. Il doit être générateur de calme ; il ne doit pas créer une trop grande agitation des sentiments ou de l'affectivité.
Le thème est choisi en dehors du corps pour les débutants et chez les personnes en mauvaise santé.
L'utilisation dynamique du thème choisi tient compte de l'état d'esprit suivant : on rassemble d'abord la pensée autour du sujet choisi de façon à écarter les pensées accessoires: cela s'appelle "rassembler" (lu). Lorsque ce rassemblement est réalisé, on détend un peu la pensée de façon à éviter une fixation : cela s'appelle "disperser" (San). En pratique, on alterne rassemblement et dispersion.
De même, lorsqu'on pense au thème choisi, on ne se fixe pas sur son titre, on se laisse seulement imprégner par son contenu : "conserver comme si on ne conservait pas ".
On dit enfin que le thème doit être présent de façon si discrète qu'il semble parfois absent de l'esprit ; c'est ce qu'on appelle "avoir comme n 'ayant pas ".
On doit parallèlement éviter les trois erreurs suivantes :
ü  Fixer ;
ü  Saisir
ü  Poursuivre.
Ces trois termes signifient que le thème doit être totalement intériorisé, sans faire l'objet d'une fixation visuelle. Si son évocation échappe, on ne doit pas tenter de la saisir à nouveau, ni à plus forte raison de la poursuivre ; de cette façon, elle reviendra naturellement.
Extrait de "Qi Gong - Yves Réquéna- Ed. Trédaniel"